samedi, 19 avril 2008
Quand Aimé Césaire parle de la poésie
«C'est cette mince pellicule sur le remous du vin / mal déposé de la mer.» Vous voyez, ce sont les paysages de la Martinique. «... c'est ce grand cabrement des chevaux de la terre / arrêtés à la dernière seconde sur un sursaut du gouffre». Vous voyez, ce sont nos montagnes. «... c'est ce sable noir qui se saboule au hoquet de l'abîme». Pour moi, c'est le Lorrain, cette baie du Nord de mon île. «... c'est du serpent têtu ce rampement hors naufrage / cette gorgée d'astres revomis en gâteau de lucioles / cette pierre sur l'océan élochant de sa bave / une main tremblante pour oiseaux de passage / ici Soleil et Lune / font les deux roues dentées savamment engrenées / d'un temps à nous moudre féroce / c'est ce mal être / cette fiente / ce sanglot de coraux / c'est fondant du ciel mémorable / jusqu'au leurre de nos coeurs rouges à l'aube / ce bec de proie rompant la poitrine inhospitalière/ cage / et / marécage / C'est cet émouchet qui blasonne le ciel de midi de nos noirs coeurs planant / ce rapt / ce sac / ce vrac / cette terre». Ce n'est pas ça, les Antilles, ce n'est pas ça, notre histoire? Ce n'est pas ça notre condition antillaise? Ce poème exprime mieux que tout ma bataille intime. Cette bataille que je livre sans cesse contre moi-même.
08:00 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, aimé césaire